Vicentia remarque son mari changer radicalement d'attitude depuis quelques jours ; plus d'une semaine déja.
Roméo est soudain, toujours gai, toujours jovial ; et toujours, bonne mine, il a. Il ne s'intéresse plus à elle. Pas pour la moindre des choses. La nuit, il lui tourne carrément le dos et dort profondément jusqu'au petit matin. Il n'a plus rien de cet homme docile qui quemandait la moindre attention de sa femme et la suppliait, lui demandait pardon en la sentant le bouder, même pour un rien du tout, ou, sans aucune raison valable, le plus souvent. Il fait comme si elle n'existait même pas ou n'a jamais existé d'ailleurs pour lui. Tout ce qui l'accroche dans tout ce changement mystérieux, est son enfant à qui il donne encore plus, tout son temps quand il est à la maison, et le mène à plus de sorties. Ils sont devenus plus complices qu'avant, on dirait qu'ils sont désormais les seuls habitants de cette maison, et ce, depuis cette nuit qu'il est allé elle ne sais où.
Et où ça pourrait être d'ailleurs, si ce n'est aller pleurnicher encore sur les épaules de sa grosse pute d'amie qu'il a amenée avec lui à la maison pour la conseiller, elle, Vicentia ?" Pense t-elle.
-Je ne sais même pas où Roméo est allé ramasser cette chose. Sincèrement, cet homme me déçoit. Comment un homme comme lui peut se rabaisser à ce point ; revendiquer la saleté avec le porc, pour aller se confectionner une quelconque relation avec une femme sans aucune mœurs ; cette frivole, une vieille vache quelle est son amie ! Quel est cet esprit grossier, il peut avoir ! Beurk ! Une femme comme moi est à honorer et c'est ce qu'il ne comprend malheureusement pas. Je ne suis pas pour son immaturité. Je le croyais à ma hauteur pour accepter finalement ses avances et aller loin en l'épousant. Que je me suis juste méprise sur lui ! Il n'est qu'un frivole malgré la classe à laquelle il appartient. Bref, les frivoles fréquentent les frivoles et c'est ce qu'il croit que je suis en l'acceptant. C'est vérifié, les hommes ont peur des femmes intelligentes, suaves et raffinées, et ils les fuient. Ils préfèrent ces pacotilles qui ne représentent rien que leurs ombres, qu'ils peuvent dominer au merveilleux nom de la soumission pour en faire leurs esclavess et serpillières. Moi, Vicentia, je ne serai jamais sous l'autorité d'aucun homme qui va se croire supérieur à moi parce que je me suis laissée à lui. Quand je passe, j'inspire le respect et l'admiration. Je tiens beaucoup à mon image, et lui cherche à me coller son immaturité. Je suis une femme épanouie. Le temps où les femmes se rabaissaient à leurs hommes et en font leurs seigneurs est révolu. Il ira et reviendra ici me supplier. Il fait juste son malin. Il en sera fatigué bientôt. Et comme toujours, venir invoquer les Cieux et la Terre pour que je le pardonne, que je laisse tout tomber, qu'il veuille sauver notre relation, se dit-elle encore malgré elle en sculptant, le vide au coin du mur de leur magnifique séjour, allongée dans le salon devant l'écran allumé abandonné à son sort contre le mur où il est aussi accroché.
Cette indifférence de son mari la marque profondément sans qu'elle n'en revienne. Le splendide séjour ne lui procure point du délice. Mais sa fierté et son arrongance ne lui permettent pas d'en mesurer la portée. Elle se voit irremplaçable, pour imaginer un seul instant que Roméo puisse la substituer dans sa vie par une autre femme avec tout l'amour qu'il lui porte, ou se séparer même d'elle carrément. Elle vit sur ses nuages de la grande Majesté, La Toute Majesté Vicentia.
Soir au crépuscule complètement englouti par la nuit venue à grands pas jouir de ses droits. Henriette cause avec ses enfants devant le petit écran allumé, au séjour de son modeste appartement vraiment à la hauteur de qui elle est et de ses moyens. Désormais, le sourire se chante plus sur son visage. C'est la joie au quotidien. Elle retrouve la paix du cœur et vit paisiblement son bonheur. Roméo, le bon Ciel ne cessera jamais de le remercier pour elle pour tout ce qu'il lui a apporté et lui apporte : la sortir de son monde et l'emmener à la reprise de confiance en soi, pour affronter la société sans se complexer, sans se fier à son jugement, à sa stigmatisation. Elle a été ce qu'elle a été même si ce n'est que quelques jours de cela, et elle est ce qu'elle est aujourd'hui et sera demain. Un autre jour s'est levé, beau, étincelant de bonheur qu'il déteint sur son cœur. Mais depuis le scénario avec Roméo et sa fille, elle n'a pas encore eu à discuter avec cette dernière. Ce soir, elle en parle.
-Dis, chérie, étais-tu vraiment sérieuse l'autre jour, que tu allais quitter la maison et me mépriser, ou bien c'était juste du chantage ?
-Quelle importance encore, meilleure maman ? On a ce qu'il faut maintenant. Tu es tout le temps avec nous. Tu n'as plus à aller te sacrifier en te livrant, le cœur pincé, aux horreurs pour nous nourrir. Un homme t'engage désormais et t'aime profondément. Et la vie se reconstruit pour toi. C'est l'essentiel. C'était le but visé.
-Je veux juste savoir, chérie. Je veux juste savoir si ma fille pouvait être capable de me faire tout ce qu'elle me disait en face en ce moment là ?
-Il ne fallait pas revenir sur ta décision pour m'éprouver non ? (Rires...) Bon, il y avait de la vérité, il y avait du chantage aussi. Oui, je sortirais sérieusement de la maison et je ne chercherais plus à te voir, mais je n'irais mener "aucune vie dévergondée," et je n'arrêterais pas non plus mes études ; elles sont trop chères pour moi. J'irais me débrouiller toute seule autrement pour me prendre en charge et revenir te prendre Victor.
-Tu m'en tuerais, Chloé. Comment pensais-tu que je pourrais survivre à ce vent ?
-En tout cas, il fallait que je te tapasse sur où il le fallait pour que tu sortisses de ton cauchemar à vouloir retourner dans la genèse des espèces pour reprogrammer le monde et le refaire.
-Tu n'es pas sérieuse, toi !
-C'est toi qui le dis hein, maman. Mais excuse-moi pour tous ces mots horribles que je t'avais employés. Je cherchais depuis à engager la discussion pour te demander pardon mais je ne trouvais pas du courage. Tu n'es rien de tout ce que chacun de ces mots signifiait. J'étais très consciente que je t'infligeais une douleur extrême avec toutes ces horreurs mais je n'avais pas le choix, parce qu'en même temps, j'étais très en colère contre toi. Il fallait comme je le disais tantôt, ce qui pourrait t'atteindre au fond de toi pour que tu te ressaisisses et accpeter. Ce n'était pas une fierté pour moi de te dire tout cela. Mais je te sais femme forte pour ne pas t'effondrer, alors j'ai osé. Pardonne-moi, je t'en prie, maman !
Elle la regarde puis lui sourit, lui ouvre les bras et l'y invite. Chloé se lève et y va. Elles se serrent dans leurs étreintes comme des sœurs, comme des amies et non comme mère et fille.
-Je n'ai pas à te pardonner, chérie. Je tiens plutôt à te remercier de ne m'avoir pas laissée commettre la pire bêtise de ma vie. Merci d'être intervenue, et merci de m'avoir utilisé tous ces mots pour me choquer. Par tes menaces et tes chantages, je suis heureuse maintenant. Merci de m'avoir permis de laisser Roméo entrer dans nos vies. Toi-même regarde comme il vous traite.
-Je t'aime, maman !
-Et moi plus chérie. Je vous aime tellement, mes amours.
Elles se libèrent finalement de leurs serres même si elles voulaient que ça continue. Et Victor qui est là, ses yeux rivés sur l'écran sans même se soucier d'elles.
Sur la parole d'Henriette : "je vous aime tellement, mes amours," Chloé revient déranger sa maman.
-Tu l'aimes plus que nous ? Ou tu nous aimes comme lui ?
-Petite fille capricieuse ! Elles s'esclaffent, elle continue. Vous êtes tous mes amours et je vous aime tous, chacun très fort. Je vous aime, vous les enfants, de l'amour d'une mère, et mon merveilleux chéri, votre futur papa, de l'amour d'une femme. On ne compare pas ces deux choses là et on ne les différencie pas non plus.
-Pas notre futur papa, mais notre papa, réclame Victor qui ouvre finalement la bouche.
Elles s'esclaffent de nouveau et Chloé de lui dire :
-Tu as raison, Victor. Il nous est déjà un papa et on en a un enfin. On ne va pas le mettre dans le futur. Elle se tourne à sa maman. Ah, c'est un homme si bon !
-C'est un ange, ma fille. Je n'arrive pas à croire qu'un homme veuille d'une femme comme moi dans sa vie, acceptant en plus mes enfants pour en faire les siens, jusqu'à ce que ce soit un homme de son rang social, après tout ce qu'il sait de moi, sans avoir peur que je ternisse son image en sa compagnie. À peu près deux semaines seulement et j'ai l'impression de vivre une éternité de bonheur qu'on ne vit que dans les rêves ou voit au cinéma.
-Ah maman ! Je te vois hein ! Façon tes yeux illuminent là...
Elles s'esclaffent encore.
-Tout ce qui est exposé à la beauté de la lumière dont il a besoin, illumine, chérie.
-Donc c'est ainsi mère et fille complotent contre le pauvre homme quand ce dernier n'est pas avec elles !
La voix de Roméo qui s'ouvre sur eux dans la chambre à leur grand étonnement avec une arrivée surprise, tenant dans ses mains, un paquet.
-Papaaaa ! Bon arrivé ! S'exclame, Victor qui se lève pour aller l'accueillir.
-Ouais, mon brave, comment tu vas ?
-Je vais bien. Et Éric, pourquoi il n'est pas venu ?
-Vous allez être ensemble toute la journée de dimanche, ne t'en fais pas. Tiens. Et il lui remet le paquet. Vas dans ta chambre pour l'ouvrir. C'est pour toi seul.
Il prend le paquet, le remercie et déserte le salon, direction leur chambre en courant sous le regard souriant de Roméo. Chloé se lève saluer leur "père" à son tour, il la taquine aussi un peu, puis elle emboîte les pas de son frère...
Roméo développe bien une grande affection pour les enfants d'Henriette. De la même manière qu'il se comporte avec son propre fils Éric, il se comporte avec eux aussi. Il a nommé Victor "mon Brave" ou "mon Homme" suite à son attitude face à lui le premier jour. Une attitude à juger impolie et insolente d'un enfant face à un étranger, lui en a vu plutôt de la bravoure. Quand il le regardait ce jour, il ne s'énervait pas. Il ne voyait pas en lui, un enfant mal éduqué, un enfant désobligeant. Il était plutôt étonné et l'admirait. Il a jugé sa réaction digne de celle d'un homme qui défend et protège les siens. Et il ne pouvait pas imaginer qu'un enfant de onze ans puisse être aussi sensible, et furieux à ce point en voyant sa maman et sa sœur en pleurs devant un inconnu qui serait venu probablement leur faire du mal sous leur propre toit. Sa réaction était tout simplement remarquable et impressionnante. Tellement il l'a marqué.
En regardant Chloé s'en aller pendant qu'Henriette se lève pour l'accueillir, Roméo secoue la tête et murmure en souriant : "ah, les enfants !"
-Bon arrivé mon chéri, lui souhaite Henriette qui vient lui mettre les mains aux épaules puis l'embrasse.
-Merci, mon Amour. Regarde comme tu es belle et excitante, Henriette.
-Pas autant que toi, qui es aussi si mignon !
Ils échangent les coups de lèvres un instant et se regardent dans les yeux, les bras d'Henriette autour du cou de Roméo et ceux de Roméo à sa taille.
-Tu es magnifique, ma Lumière. Merci d'être là pour moi.
-Je suis là, et je serai toujours là pour toi. Toi seul, uniquement toi, mon amour.
-Je sais tout ça chérie. Et tu ne t'imagines pas quel bonheur tu me procures.
-C'est si réciproque, mon Roi !
Ils se mettent à s'embrasser de nouveau.
-Tu m'as manqué ces deux jours sans t'avoir vue, Henriette.
-Tu ne fais que me manquer aussi, Roméo. Viens t'asseoir. Je te prépare à manger avant que tu ne repartes.
-Repartir ! Pour aller où ? Et si on allait plutôt là, pour nous manger ? C'est de toi moi j'ai faim !
-Où chéri ?
-Mais là, Henriette, en lui indiquant de sa tête, la porte de sa chambre.
-Mais non, Roméo ! Tu sais que ça ne peut pas être possible ici.
-Et pourquoi pas ?
-Les enfants ! Ils sont juste à côté. Ils ne sont plus des petits qui ne savent rien. Et qu'un homme vienne chez leur maman, et qu'ils s'enferment dans la chambre sous leurs nez n'est pas du tout raisonnable, mon amour !
-Les enfants savent qui nous sommes, Henriette. Laisse les tabous inutiles, s'il te plaît.
-Aussi, tu sais pertinemment que chez moi ici n'est pas un cadre pour toi. Il n'y a aucun confort ici et qui va avec toi. On peut dire aux enfants qu'on sort. Ensuite, on va à un endroit plus propice pour toi, s'il te plaît, chéri !
-Tu ne comprends pas, Henriette. Aujourd'hui, je ne rentre pas à la maison. Je ne vais pas non plus à l'hôtel avec toi comme pour notre première fois, et je n'irai plus jamais à l'hôtel avec toi. Je passe la nuit ici chez toi, jusqu'au petit matin.
-Et ta voiture ? Elle ne peut pas rester au dehors !
-Elle n'y est même pas, mon amour.
Aussitôt il finit ces mots qu'il déploie ses muscles pour soulever et prendre Henriette dans ses bras, direction sa chambre. De son pied gauche, il libère le passage, arrivés à la porte. Il la porte, pas directement au lit en pénétrant la chambre où il vient même de mettre pieds pour la première fois, mais dans les toilettes pour une douche fraîche ensemble. Des toillettes, il la porte encore pour sortir et la jeter dans le lit. Ils se déchirent tous deux de passions folles, et d'amusements : jeux de coussins. La joie de Roméo ce soir est encore plus grande, laissant deviner clairement que derrière cette euphorie, se cache quelque chose de joviale qui l'anime tant, et non seulement, son envie de venir fusionner avec Henriette et passer la nuit avec elle.
Les chants mélodieux des alouettes et des rossignols de la suave voix qui leur parvient dans la chambre à leurs oreilles, leur annonce le lever du jour. Tellement ils se sont amusés et ont dormi profondément dans leurs bras.
-Tu es trop méchante, je ne t'aime plus ! Crie Éric à sa maman Vicentia avant de filer vers son papa en larmes.
-Oui, c'est ça, vas-y, petit enfant gâté. Impoli va ! Ça se déteint sur toi aussi déjà non ? Du pareil au même ! La même graine.
Dans sa frustration, Vicentia vient de lever la main sur son enfant pour un rien du tout, sûrement pour attirer l'attention de Roméo qui depuis toujours n'a plus d'égards pour elle dans la maison. Deux semaines se sont écoulées déjà ainsi. Et c'est la deuxième fois que son mari passe la nuit au dehors aussi. D'abord cette nuit qui était sa dernière fois de l'avoir touchée encore au lit, et elle lui avait lancé pour une énième fois d'aller se chercher une pétasse au dehors pour ses fantasmes, que c'etait parce qu'elle s'etait laissée à lui pour qu'il se permette une plainte, puis, il y a trois jours, la deuxième, quand il a quitté la maison après son retour du boulot juste pour voir son fils et repartir pour ne rentrer que le lendemain soir.
-Allez mon garçon, ce n'est pas du tout bienséant, de dire à maman qu'elle est méchante et qu'on ne l'aime pas. Ce n'est pas poli et ce n'est pas gentil de parler comme ça à maman. Vas demander pardon à maman avant de venir chez moi. Aller, vas-y ! Vas dire maman, pardonne-moi ! Recommande Roméo à Éric à son arrivée à lui pour se réfugier..., et le petit s'exécute, malgré lui. Ah, qu'il a de la peine !

-Ce n'est que le début et ton calvaire ne vient que de commencer dans cette maison. Tu ne perds rien pour attendre. Encore deux semaines et on verra qui est vraiment qui ici, se dit Roméo en fixant Vicentia du coin de l'œil.