Il était une fois une jolie femme, si jolie, oh si jolie qu'elle ne semblait pas un être humain. Un roi la vit et dit:
- Cette femme-là, il faut que je l'épouse!
Il partit la trouver, s'occupa de tout et l'épousa ; il l'amena dans sa demeure. Or, il se trouvait que cette femme n'était pas un être humain, c'était une ânesse! Chaque jour, au bout d'un certain temps, elle disait qu'elle allait uriner, ou encore qu'elle allait se promener. Or, chaque fois, elle se transformait, car ses congénères les ânes l'appelaient derrière le village.
Elle répéta cela, le répéta, le répéta jusqu'à ce qu'un jour elle demanda de partir en un lieu plus éloigné, prétextant qu'elle allait voir ses parents. Le roi la laissa partir. Elle allait en réalité voir les ânes de la brousse. Elle partit rejoindre les ânes et se transforma ; elle y resta en train de braire.
Un Maure la vit. Il la suivit et alla se cacher derrière un arbre jusqu'à ce qu'elle commence à braire. Alors le Maure se faufila furtivement et revint à la maison.
Il dit:
- Oh, Roi, je jure, aujourd'hui je vais te dire une chose, et si ce n'est pas vrai tu pourras me tuer!
Le roi lui dit:
- Ah Naar, moi, le menteur je le tue!
Le Maure lui répondit:
- Je jure! Bour, ce que je dis est vrai, je le jure! Ta femme-là, qui est si belle, si belle, belle, tu comprends, c'est une ânesse, ce n'est pas une personne.
Le roi dit:
- Ah oui?
Le maure:
- Oui!
Le roi dit:
- C'est bien!
Le Maure dit:
- Si elle te demande encore la permission, fais-moi accompagner par quelqu'un, ou toi-même, suis-moi.
Un autre jour, la femme s'adressa encore au roi... Elle lui demanda la permission de sortir, le roi lui dit:
- D'accord.
Le Maure fut accompagné d'un soldat. Ils suivirent la femme, la suivirent jusque dans la brousse. Elle se transforma, rentra parmi les ânes; ils commencèrent à braire. Aussitôt les hommes s'en retournèrent chez le roi.
L'homme dit:
- Oh Roi, par Dieu! Ce que le Maure a dit, c'est la vérité, je jure que c'est vrai!
Le roi dit:
- C'est bien, je verrai cela moi-même.
Il en fut ainsi. La femme, lorsqu'elle était dans sa demeure, les ânes ses semblables chantaient dehors et dès qu'elle les entendait, elle disait qu'elle voulait sortir. Quand on eut découvert ses manières d'agir, le roi se dit:
- Je verrai cela moi-même.
Et un jour, alors que le roi était assis à côté de sa femme, les ânes au dehors commencèrent à chanter:
- Fari Dangan Dangani ... n'habite-t-elle pas par là?
Dis, Fari toi.
Fari la reine des ânes est allée vivre ailleurs.
Elle refuse de revenir.
Le corps de la reine commença à se transformer, tout son corps. Brusquement, elle se métamorphosa en ânesse, au beau milieu de la cour. Le roi prit son fusil et tira sur elle, elle s'écroula. Puis, il fit appeler le Maure et le soldat pour les récompenser.
C'est là que le conte alla tomber dans la mer.
Ce conte est extrait du recueil « Des contes wolof ou la vie rêvée », rassemblés par Seydou Nourou Ndiaye et Lilyan Kesteloot édités par IFAN et Enda, à Dakar, en 1996 dans la collection "Clair de lune".